mardi 12 mars 2013

Malgré sa Trinité, l'Hindouisme est monothéiste dans son essence


La similitude entre Brahma et Abraham ne se limite pas à la proximité phonétique entre les deux noms ni à d’une lecture rapide du texte biblique qui laisserait penser qu' Abraham serait lui-même le créateur du Ciel et la terre, transformant ainsi le Patriarche en dieu lui-même, ils ont bien d’autres points communs. 

Tous deux eurent des enfants à un âge avancé (Gen. 15:2-4 et Gopatha Brahmana 1:1), tous deux eurent deux fils : Atharva et Angiras pour Brahma, Ismaël et Isaak pour Abraham, tous deux eurent deux épouses, qui plus est, présentent des similitudes troublantes. Si le nom de Sarah ressemble à s'y méprendre à Saraswati, Pârvatî, le nom de la seconde épouse de Brahma, aurait la même signification que  Agar. En effet Agar, la mère d’Ismaël est connue en arabe sous le nom d’ Hajar (il n’y a pas de G, ni de E en arabe). Hajar en arabe signifie pierre, précieuse ou non, et Pârvatî signifie "celle qui réside dans les montagnes" ou simplement « montagne ; ce qui n’est pas bien surprenant puisqu'elle est fille d'Himavat, soit  Himalaya.  

Il est important de noter qu’en Inde Abraham est nommé Brahmaji, père de l’humanité et premier des dieux, alors que  Brahma est nommé Parjapati, qui signifie « père des nations », soit une parfaite définition du nom d’Abraham en hébreu.


Quelle importance me direz-vous, Brahma et Abraham ne peuvent se rencontrer que sur leur perception de Dieu, or l’Abrahamisme et le Judaïsme qui le suit, revendique un dieu unique et l’Hindouisme est polythéiste. Or, il semble qu’il n’en est rien et que l’Hindouisme des origines - celui qui recoupe l’époque d’Abraham (-1800 environ) - soit en fait parfaitement monothéiste. 

Les Traités du Véda : Rigvéda, Yajurvéda, le Samvéda, Atharvavéda, nous disent que Brahman est le Dieu Unique, la réalité ultime, l’âme absolue et universelle. Quelques citations :

-       « Les sages appellent Dieu l’unique par des nombreux noms » (Rigvéda 1 :164 :46)

-          " Rien ne lui ressemble" (Rigvéda 8 :1 :1)

-       « Oh mon ami, n’adore que Lui, dieu unique » (Rigvéda 8 :1 :1)

-       « Il est au-delà de l’image » (Yajurvéda 32 :3)

-        « Il est sans corps et pur » (Yajurvéda 40 :8)

-       « Ils entrent dans l’obscurité ceux qui adorent les éléments naturels, ils s’enfoncent dans l’obscurité ceux qui adorent les idoles » (Yajurvéda 40 :9)

-        
Dans les Upanishad, les textes philosophiques qui forment la base théorique de la religion hindoue et qui constituent en quelque sorte la conclusion des Veda, Brahman est décrit comme le Dieu indescriptible, omniscient, omniprésent, absolu transcendant, et le principe de toute chose, au-delà de l’espace et du temps.
-       « Il est unique sans autre second » (6 :2 :1)

-       « Il n’a ni parents ni Seigneur » (6 :9)

-       « Rien ne lui ressemble »
-       « Il est sans forme visible, personne ne peut le voir avec son œil » (4 :20)

-        
L’Hindouisme des origines serait donc considéré à tort comme polythéiste car en réalité il n’y a qu’un seul dieu à l’origine de tout, créateur du monde et omnipotent nommé Brahman.
 Le mot d’Hindouisme  est en fait plus récent que la religion elle-même qui remonte à la nuit des temps. Ce sont les Musulmans, rencontrant pour la première fois des hindouistes dans la vallée du Sindt, où coule l’Indus, qui leur ont donné un nom dérivé de cette province et de ce fleuve. On devrait parler plutôt de Brahmanisme, soit la religion des prêtres Brahmanes ou utiliser le terme de sanatanadharma, soit la loi éternelle » (Les religions de l’Humanité par Michel Malherbe page 211).


Le Brahmanisme monothéiste originel cède rapidement la place à un triumvirat ou une Trinité qui comporte outre Brahma, le créateur, Vishnou, le protecteur et Shiva, le destructeur. Shiva est un dieu dynamique, qui semblable à la vie, crée et détruit ; Vishnou au contraire est statique, chargé de maintenir l’ordre du monde. Dans cette trinité, c’est Shiva et Vishnou qui sont à l’honneur, et les temples qui leurs sont consacrés dépassent de beaucoup les quelques temples consacrés à Brahma. Il existe également des sectes Vishnouïtes et des sectes Shivaïtes, pour les adeptes desquels  Brahma est un dieu secondaire. Rien ne vient limiter le nombre de dieux aux deux dieux cités. Une quantité d’autres dieux plus ou moins importants, vivent au ciel et certains d’entre eux ont une durée de vie semblable à celle des hommes. Dès le début de l’époque védique on comptait 33 dieux dont le chef était Indra, source de la force cosmique et maître de la pluie, qui habite le mont Meru. S’y sont rajoutés par la suite un nombre incalculable de dieux, et chaque hindouiste consacrera sa dévotion au dieu qui lui correspond et lui convient le mieux.


Selon la tradition juive, cela revient à attribuer à des attributs divins ou à des manifestations climatiques ou matérielles, une autonomie qui transforme un attribut (lire en hébreu Séphira ou Mida) ou une manifestation climatique, en un dieu à part entière. C’est comme si la Sephira Gevoura (Din) devenait le dieu de la guerre, la Sephira Hessed, le dieu de la bonté, Tiférét se transformant en dieu beauté. Ce dérapage est compréhensible dans la mesure où l’on a tendance à adorer ce qui précisément nous manque et ce à quoi nous aspirons. Il n’est pas étonnant qu’un paysan adore et sacrifie au dieu de la pluie et qu’un forgeron s’attache au dieu de la guerre. Cela dépend aussi du niveau culturel de l’individu ; une personne peu évoluée aurait tendance à s’attacher à la lettre de la chose et un individu plus cultivé à son aspect symbolique.


La répartition des taches entre  Shiva qui crée et détruit et Vishnou chargé de maintenir l’ordre du monde nous renvoie à un concept judaïque qui nous dit qu’avant de créer le monde que nous connaissons, D.ieu créait des mondes et les détruisait,  bara Olamot ou ma’hrivan (Midrash Berechith Rabba 3 et Ezekiel 60 :17).  Ce concept mériterait un long développement qui est hors sujet dans notre développement. Il n’empêche que le couple Vishnou-Shiva a pour mission de compléter l’œuvre créatrice de Brahma, l’un générant des cycles, qui ont un début et une fin, et l’autre modérant les ardeurs du premier.  Ceci aboutit au concept de Trinité qui a une portée polythéiste indéniable, mais, il n’est pas le seul, n’est ce pas ?


Autre dérive de l’Hindouisme est, qu’avec le temps, les prêtres Brahmanes se sont focalisés sur le rite sacrificiel, délaissant son aspect spirituel. Les sacrifices étaient devenus un  échange de bons offices entre les hommes et les dieux. Les hommes nourrissant les dieux par des offrandes et attendant en retour, des récoltes abondantes, la prospérité, la longévité ; enfin tout ce que leur dieu favori était susceptible de leur apporter. Le pouvoir était détenu par les Brahmanes, seuls connaisseurs du rite sacrificiel qu’ils pratiquent moyennant honoraires. Sur cette dérive du Védisme, Bouddha apparaît au devant de la scène, devenant ainsi le revivificateur de la religion védique qui avait perdu son impact originel et son monothéisme brahmique. Mais, son impact sur l’Inde est négligeable; nul n’est prophète dans son pays .

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