mardi 17 avril 2018

L’alphabet hébraïque et la Shoah


En ces jours où nous célébrons en Israël Yom Haatsmaout (La Fête de l’Indépendance), précédé par le Yom Hashoah, il m’a semblé utile de faire un parallèle rapide, qui n’engage que moi, entre l’alphabet hébraïque, la Shoah et Yom Haatsmaout.

Vous connaissez bien entendu le psaume Ashrèy Yoshvèy Béitekha אשרי יושבי ביתך. Normal, c’est le psaume le plus récité, puisque il figure trois fois dans les prières quotidiennes. Ce psaume qui comporte la particularité de passer en revue toutes les lettres de l’alphabet, de Alef jusqu’à Tav  מֵאָלֵף עַד תָּו, présente une particularité surprenante. La lettre Noun נון est escamotée. Sachant que le Roi David connaissait son alphabet mieux que vous et moi, on est en droit de se demander pourquoi a-t-il laissé tomber Noun dans la suite logique des 22 lettres de l’alphabet hébraïque. La réponse est que précisément la lettre NOUN renvoie sur "tomber" נפל

Les Sages du Talmud se sont bien entendu penchés sur cette omission et nous expliquent qu’il existe un Passouk, une citation, qui présage des choses terribles pour le peuple d’Israël : 
נפלה לא תוסיף קום בתולת ישראל, "Elle est tombée et ne se relèvera plus, la fille (vierge) d’Israël". Cette prophétie est si terrible que David a préféré faire l’impasse sur quinzième lettre de l’alphabet, passant de Mém (Quatorzième lettre)  à Samekh  (seizième lettre).

A ce stade on peut déjà supposer qu’une menace d’extermination totale - appelons-là la Shoah -  planait sur le peuple, et que le roi David, dans sa vision prophétique a préféré ne pas en parler, tout simplement. Évitons de לפתוח פה לשטן, que l’on pourrait traduire littéralement  par "ne laisse pas le Satan ouvrir la bouche". Vous m’avez compris !

Bien entendu, nos sages, pour faire contrepoids à la malédiction citée plus haut nous apportent d’autres psoukim, passages qui eux, sont porteurs d’espoir et/ou ponctuent différemment cette phrase pour démontrer qu’elle signifie le contraire de son sens littéral. Il n’empêche que ce qui est dit est dit, alors pourquoi prendre des risques. Evitons d’en parler.

La lettre Samekh qui suit la lettre Noun dans l’alphabet renvoie sur la notion de "soutien "  סומך השם לכל הנופלים

Dieu soutient tous ceux qui tombent. Autrement dit, la lettre Samekh est en quelque sorte l’antidote à la lettre Noun. On tombe, puis on est soutenu, ou bien, le tombant peut s’adosser à son Soutien. Peut-être, mais où était le Soutien d’Israël pendant que nos Anciens tombaient comme des mouches ? Il faut croire que c’est la génération des rescapés, ceux qui ne sont pas tombés qui ont été relevés par Hashém, ce qui a permis en passant de construire l’Etat d’Israël. Pour mieux le comprendre regardons attentivement la forme de la lettre Noun נ ן . Si elle figure au milieu de d’un mot elle fait penser à un homme courbé, la tête penchée, humble et implorant. Par contre le Noun en fin de mot que l’on désigne en hébreu Noun Sofit נ ן סופית soit Noun finale, illustre un homme se tenant bien droit, les pieds fermement accrochés au sol et la tête droite, fier. Le Noun est d’abord כפוף, puis זכוף, plié puis déplié. Les tombants ont relevé la tête.

La lettre Samekh n’a pas que des vertus positives, elle comporte aussi une dimension inquiétante. D’abord les deux premières lettres de la lettre סמך, soit סמ signifie "drogue", poison. De plus, elle renvoie à un mauvais ange סַמָּאֵל l’ange de la mort ou le démon ultimatif ; une créature dont il est recommandé de ne pas prononcer le nom. Ce n’est sans doute pas pour rien que la Schutzstaffe, la plus ignoble des organisations nazies a été baptisée S S et que le serpent qui ressemble à un S, émet un son sifflant qui n’est pas sans rappeler les SSSSSS….

Si cela vous a intéressé, ne manquez pas d’écouter sur Youtube, les cours sur les lettres hébraïques. A préciser que ce sont vraiment des cours et non des conférences; donc attendez-vous à des interruptions, mais aussi à un approfondissement en hébreu.


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